Canicule : a-t-on le droit de casser la vitre d’un véhicule pour sauver un animal?
Alors qu’un épisode de canicule précoce et intense est attendu en France toute la semaine prochaine, la Fondation assistance aux animaux a donné quelques conseils sur la marche à suivre si vous voyez un animal en détresse enfermé dans une voiture en plein soleil.
Vérifiez dans un premier temps que les maîtres ne sont pas aux alentours. Si ce n’est pas le cas, appelez dans un second temps la police ou la gendarmerie locale. Si vous estimez que la situation est urgente, vous pouvez prendre la décision de briser la vitre pour secourir l’animal en détresse. Il est alors recommandé de s’entourer d’au moins deux témoins qui “pourront attester de la bonne foi si une action par le propriétaire de la voiture est intentée par la suite”, explique le ministère de l’Intérieur.
Ensuite, “en cas d’intervention, placez l’animal à l’ombre, rafraîchissez-le avec de l’eau pas trop froide pour faire redescendre sa température et donnez-lui bien sûr à boire, mais par petites quantités. Une visite chez le vétérinaire est conseillée lorsque le chien semble avoir récupéré”.
Dans un véhicule, “la température peut très rapidement atteindre 70 ou 75°c dans une voiture arrêtée au soleil”, explique le professeur Dominique Grandjean. “De plus, le chien est un animal qui thérmo-régule très mal: il a beaucoup de mal à évacuer la chaleur. Un chien peut garder des séquelles après 12 minutes de suffocation et peut mourir en moins d’une heure”.
Appeler les secours
C’est l’urgence de ces situations qui pousse des particuliers à briser les vitres des voitures pour leur sauver la vie. En province plus qu’à Paris où les coups de chaleurs sont moins fréquents, les services des pompiers peuvent libérer jusqu’à trois chiens par jour selon le vétérinaire.
La loi est très claire concernant la dégradation volontaire d’un véhicule. Le propriétaire de la voiture et de l’animal peut se retourner contre le “sauveur” du chien en déposant une plainte. L’article 322-1 du code pénal dispose en effet que la “destruction, dégradation ou détérioration d’un bien appartenant à autrui est punie de deux ans d’emprisonnement et de 30.000 euros d’amende, sauf s’il n’en est résulté qu’un dommage léger.”
Pour Éric de Caumont, avocat au barreau de Paris et président de l’Association des avocats de l’automobile, les témoins d’un chien en souffrance n’ont pas le droit de briser une vitre mais en ont le devoir. “Dans ce cas très précis, on oppose deux principes du droit: celui de la propriété privée et du secours à un être vivant menacé de mort. Il est très clair que c’est le deuxième qui l’emporte, explique-t-il. Comme pour un bébé oublié, on ne laisse pas un animal mourir”.
“Je recommande que les gens appellent les pompiers, explique le chef vétérinaire des Pompiers de Paris. S’il y a urgence, nous fracturons la voiture sans nous poser de questions, mais nous allons également prévenir les services de police qui peuvent briser les vitres, dresser un constat et infliger une amende au propriétaire”. En principe, les forces de l’ordre sont les seules à avoir le droit de “procéder à l’ouverture de tout véhicule lorsque la vie de l’animal est en danger”, dispose l’article L214-23 du code rural.
Bien s’entourer
Le particulier qui aura fracturé le véhicule du tiers tombe donc sous le coup de la loi. Si par malheur il fait face à un propriétaire procédurier, il pourra invoquer l’article 122-7 du Nouveau Code de procédure pénal qui ajoute la conjoncture de “danger actuel ou imminent”. “N’est pas pénalement responsable la personne qui, face à un danger actuel ou imminent qui menace elle-même, autrui ou un bien, accomplit un acte nécessaire à la sauvegarde de la personne ou du bien”, dit la loi.
Cet état de nécessité, qui autorise une action illégale pour empêcher que se réalise un fait plus grave, fait généralement mouche devant un juge qui sera sensible à ses arguments en fonction des circonstances.
Il est toutefois conseillé de bien s’entourer pour se défendre. Le particulier, qui devra prouver le danger de la situation aura tout intérêt à conserver le numéro d’éventuels témoins pour appuyer son témoignage. S’il juge que le chien ne peut pas attendre l’arrivée des forces de l’ordre ou de secours, il pourra également appeler les services de protection des animaux qui constateront l’état de l’animal libéré et pourront porter plainte contre le propriétaire.
“10% des chiens que nous recueillons ont été récupérés dans des voitures, explique Emeline Sturmer de la SPA de Nîmes. Nous n’avons pas le droit de casser les vitres, mais nous nous rendons sur place pour constater le fait et pouvons appeler les secours. La SPA dépose systématiquement plainte contre le propriétaire du chien, mais nous regrettons qu’elles n’aboutissent rarement”.
Source : Le Huffington Post